Portrait de Vanessa Krycève, cuisiner ensemble pour restaurer le monde

Présente-toi en quelques mots :

Je m’appelle Vanessa Krycève et je suis la fondatrice du projet, de l’association Le RECHO et de l’entreprise d’insertion La Table du RECHO.

J’ai un parcours particulier et assez éloigné de l’entrepreneuriat, ma première expérience entrepreneuriale est d’ailleurs celle du RECHO !

Je suis actrice et cuisinière de formation. C’est une vision très militante de mes deux professions qui m’a poussé à créer l’association.

Parle-nous de ton projet :

« Cuisinons ensemble pour restaurer le monde », c’est notre devise !

Le projet du RECHO est né en 2016 à travers des ateliers de cuisine et banquets collaboratifs durant lesquels des publics exilés et locaux se retrouvaient autour de la table pour déguster des recettes cuisinées ensemble.

À partir de 2020, j’ai eu l’idée de faire évoluer le projet en passant de l’inclusion sociale à l’insertion professionnelle à destination des personnes réfugiées désireuses de se former aux métiers de la restauration.

Aujourd’hui, le projet s’articule entre l’association Le RECHO et l’entreprise La Table du RECHO, agréée entreprise d’insertion professionnelle à destination des personnes réfugiées statutaires, proposant un parcours d’intégration d’environ 18 mois. 

Ce projet met en lumière une vision militante de la cuisine engagée et durable.

L’ambition de La Table du RECHO est de créer un restaurant humaniste mettant à l’honneur une cuisine du vivant, concoctée à partir de produits bruts, majoritairement biologiques, locaux et paysans.

Le restaurant se veut responsable jusque dans sa manière de travailler en cuisine : réduction des déchets, limitation maximale de plastique non réutilisable, mode de cuisson peu énergivore, etc…

Dans les assiettes, l’équilibre nutritionnel est toujours respecté, faisant la part belle au végétal afin de promouvoir une cuisine flexitarienne.

Quelle est la particularité de ton projet ?

La particularité du projet du RECHO est sa vision systémique : il n’y a pas de social sans écologie. Nous pensons la cuisine comme un levier de transition sociale et écologique.

Finalement, nous ne parlons pas de restauration écologique mais humaniste.

Nous avons une vision de la position de la culture dans l’humanisme ; ce que nous faisons s’apparente à du plaisir gastronomique.

Nous avons à cœur de faire rimer solidarité avec une cuisine haut de gamme, mettant à l’honneur la notion de « mieux manger ».

Dans notre restaurant d’insertion, nous travaillons avec des produits excellents et nos cuisiniers sont des auteurs qui ont à cœur de proposer une très belle cuisine.
 
Notre objectif est de tisser une chaîne de solidarité, un cercle vertueux avec nos clients, qui peuvent par exemple laisser des tickets suspendus au moment de l’addition afin de permettre à des personnes en situation de précarité de profiter d’un repas offert.

Nous organisons également des « tables des voisins » pour permettre aux personnes en situation de précarité, isolées ou vulnérables, de venir déjeuner une fois par mois dans nos restaurants et de rencontrer les habitants du quartier, tout en sympathisant autour du plaisir convivial de la table.
 
Avec la Table du RECHO, nous avons également développé une activité traiteur qui nous permet de toucher un autre type de public pour des prestations différentes.

Pour chaque prestation traiteur réalisée, un pourcentage est reversé à notre association.

Ainsi, avec ce projet, nous avons adopté une pensée globale de la cuisine et nous souhaitons rendre acteur et actrice les personnes qui nous sollicitent.

As-tu eu toujours envie de devenir une entrepreneuse ?

Pas du tout. J’ai un papa et un frère entrepreneur et je me suis toujours dit que j’étais très loin de leurs métiers, ça ne me donnait pas envie.

Cependant, en étant actrice, je n’étais pas assez active. Finalement, en découvrant l’entrepreneuriat, je suis devenue plus actrice qu’en l’étant par métier.

Être entrepreneuse, c’est être active, rassembler les acteurs d’aujourd’hui, écrire l’histoire que l’on a envie d’écrire, une histoire que l’on écrit dans le monde réel.

J’ai découvert en ce métier une réalité pragmatique que je n’avais pas avant et c’est passionnant !

Qu’aime-tu le plus en étant entrepreneuse ?

En tant qu’entrepreneuse, ce que j’aime le plus c’est qu’il n’y a pas un jour qui se ressemble.

J’aime l’action, la possibilité d’agir et de rendre concrète une idée ou une utopie, une vision et faire en sorte qu’elle s’incarne dans le monde réel et de pouvoir observer ce que cela va provoquer au sein de la société.

J’aime me dire que je me réveille avec un concept et une idée et que quelques mois plus tard, cette idée existe et sert d’autres personnes.

Finalement, j’aime également la posture de créateur que donne l’entrepreneuriat.

Qu’est-ce qui te motive au quotidien ?

Ce qui me motive au quotidien, c’est le « faire ensemble », l’impact, avoir la liberté de rassembler des collaborateurs avec qui on a envie de travailler et aller ensemble dans une direction qui, à terme, transforme le quotidien des autres.
 
Ce que m’anime, c’est de pouvoir transformer une société avec laquelle je ne suis pas d’accord, pouvoir poser les jalons et réaliser des actions concrètes et pleines de sens.

Pourquoi as-tu décidé de lancer ton projet ? A-t-il été inspiré par une tierce personne ou par un constat personnel ?

C’est un enchaînement d’informations et de traumatismes qui m’ont conduit à vouloir agir.

Il y a eu les attentats en 2015, la crise syrienne, un message de ma sœur en 2016 ayant croisé un couple de réfugiés syriens qui faisait la manche avec leurs enfants en Allemagne qui l’a marqué.

Mon histoire personnelle a également joué un grand rôle dans la création de mon projet, car je viens d’une famille de réfugiés polonais.
 
Finalement, c’était pour moi une évidence de me servir de ce que je savais faire pour aider les autres, et ça a été la cuisine.

Dans nos restaurants, nous réunissons populations accueillies et accueillantes. Même si les recettes de cuisine restent quelque chose d’intime, c’est également un moyen de partager un peu de son histoire avec un inconnu. 

En favorisant le vivre-ensemble à travers la cuisine, notre but est de dédramatiser la rencontre et de permettre à toutes et tous de tisser du lien social.

Parle-nous de ton accompagnement REC Innovation, qu’attendais-tu de cet accompagnement ?

Avec l’association Le RECHO, nous sommes accompagnés sur des sujets de communication par Alexandra Robert.

L’accompagnement est très intéressant, cela nous a permis de nous poser les bonnes questions et de prendre de la hauteur sur des sujets de communication et de marketing.

Cela nous permet d’accélérer notre développement et notre croissance, ce qui est essentiel.
 
Pour la partie accompagnement collectif, nous avons par exemple suivi une formation très intéressante et indispensable.

Suivre cette formation avec d’autres entrepreneurs permet de se retrouver entre pairs et de se sentir moins seule sur certains sujets.
 
J’ai l’impression d’être une taupe qui vient de s’acheter des lunettes et que je commence à entrevoir des contours, des cadres, des procédures qui permettent de faire avancer le projet !

Auteur : Vanessa Krycève et Roxanne Cuzol